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Section 8 Applications de la dérivation

Définition 8.1. Segment entre deux points de \(\R^n\).

Dans \(\R^n\text{,}\) le segment entre deux points \(a=(a_1,...,a_n)\) et \(b=(b_1,...,b_n)\) est décrit par

\begin{equation*} [a,b] = \{(1-t)a+tb,\, t \in [0,1]\} = \{((1-t)a_1+tb_1, .... (1-t)a_n+t b_n), t \in [0,1] \end{equation*}

Autrement dit, pour un point \(u\in \R^n\text{,}\) on a

\begin{equation*} u \in [a,b] \iff \text{ il existe } t\in [0,1] \text{ t.q. } u=(1-t)a+tb \end{equation*}

\(u\in [a,b]\) ne signifie pas \(a\leq u \leq b\) : une inégalité entre vecteurs, ça ne veut rien dire.

Par exemple, les points suivants sont dans \([a,b]\text{:}\)

\begin{gather*} \frac12a +\frac12b = \left(\frac12 a_1+ \frac12 b_1,...., \frac12 a_n+\frac12b_n\right)\\ \frac25 a+\frac35 b = \left(\frac25a_1+\frac35 b_1,..., \frac25a_n+\frac35 b_n\right) \end{gather*}

Par exemple, dans le schéma ci-dessous, on peut utiliser le théorème de la valeur moyenne entre \(u_2\) et \(u_3\text{,}\) mais pas entre \(u_0\) et \(u_1\) ni entre \(u_4\) et \(u_5\text{:}\)

Estimation d'erreurs

Remarquons que, comme \(A\) est un ouvert, pour tout \(u_0\in A\text{,}\) on a une boule \(B_r(u_0)\) autour de ce point qui est incluse dans \(A\text{.}\) Et du coup, si on prend un petit vecteur \(\Delta x\text{,}\) avec \(\|\Delta u\|\lt r\text{,}\) \(u_0+\Delta u\) est aussi un point de \(A\text{,}\) et le segment qui relie \(u_0\) à \(u_0+\Delta u\) est inclus dans la boule \(B_r(u_0)\text{,}\) donc dans \(A\text{.}\)

\(\leadsto\) On peut appliquer le théorème de la moyenne sur le segment \([u_0,u_0+\Delta u]\text{:}\) on a un \(v \in [u_0,u_0+\Delta u]\) tel que

\begin{equation*} |f(u_0+\Delta x) - f(u_0)| = \left|\nabla f(v) \cdot \Delta u\right| \end{equation*}

\(\leadsto\) Si les dérivées partielles de \(f\) sont continues, quand \(\Delta\) est petit, \(v \in [u_0,u_0+\Delta u]\) est très proche de \(u_0\text{,}\) et donc \(\nabla f(v)\) est très proche de \(\nabla f (u_0)\text{:}\) donc on peut approximer

\begin{equation*} |f(u_0+\Delta x) - f(u_0)| \simeq \left|\nabla f(u_0) \cdot \Delta u\right| \end{equation*}

\(\leadsto\) Ce qui nous permet de faire des évaluations d'erreur: une fois qu'on sort du royaume de la perfection mathématiques pour s'attaquer à des problèmes réels, on ne peut pas forcément mesurer nos variables avec une précision infinie (en tout cas, c'est ce que m'ont dit les gens qui s'adonnent à ce genre de choses).

Dans ce cas, si on estime que l'erreur qu'on commet en mesurant \(u_0\) est \(\Delta u\text{,}\) l'erreur qu'on commet en calculant \(f(u_0)\) est estimée à

\begin{equation*} \left|\nabla f(u_0) \cdot \Delta u\right| \end{equation*}

Projet 8.2.

(a)

Un coureur parcourt une distance de 50 mètres en 5.8 secondes. L’erreur qu’on fait sur la distance est de 0.1 mètres, l’erreur sur le temps est 0.01 secondes.

Donner une estimation de l’erreur commise sur le calcul de sa vitesse moyenne.

Fonctions constantes

Une autre application de la dérivation concerne les fonctions constantes.

Pour une fonction \(f:D_f\subset \R \rightarrow \R\) à une seule variable, dérivable, il est bien connu que, si \(f'(x) = 0\) pour tout \(x\in D_f\text{,}\) alors \(f\) est constante.

Vraiment ?

Même pour la fonction \(f\) définie sur \(D_f=\,]\,0,1\,[\, \cup \,]\,2,3\,[\,\) par

\begin{equation*} f(x) = \begin{cases} 4 \amp\text{ si } 0\lt x \lt 1 \\ 2\pi^3 \amp\text{ si } 2\lt x \lt 3 \end{cases} \quad ? \end{equation*}

\(\leadsto\) \(f\) est dérivable sur \(D_f\text{,}\) sa dérivée est tout à fait nulle, mais \(f\) n'est pas constante sur \(D_f\text{:}\) elle prend deux valeurs différentes.

Par contre, \(f\) est constante sur chaque "morceau" de \(D_f\text{.}\)

\(\leadsto\) Comment parler mathématiquement de "morceau" d'un ensemble ?

Dans \(\R\text{,}\) c'est facile : un ensemble "en un seul morceau", c'est un intervalle. Mais dans \(\R^n\text{,}\) comme toujours, les possibilités sont beaucoup plus variées:

Dans un premier temps, on va chercher l'inspiration dans \(\R\text{:}\) comme on a vu, une union d'intervalles séparés les uns des autres n'est pas "en un seul morceau". On dira, plus élégamment, "connexe".

Mais ce n'est pas vrai non plus qu'une union d'intervalles disjoints est forcément en plusieurs morceaux: par exemple, \(\R=\lbb-\infty,0] \cup \lbb 0,+\infty\rbb\) est l'union de deux intervalles disjoints, mais on a quand même envie de dire qu'il est d'un seul tenant. Pardon, connexe.

\(\leadsto\) Par contre, une union de deux intervalles ouverts disjoints n'est certainement pas en un seul morceau.

Enfin, sauf si un des deux est vide !  2 

D'où:

Définition 8.3.

On dit qu'un ouvert \(A\subset \R^n\) est connexe si

\begin{equation*} A=A_1\sqcup A_2, A_1,A_2\text{ ouverts } \Rightarrow A_1=\emptyset \text{ ou } A_2=\emptyset \end{equation*}

\(\leadsto\) AUtrement dit, un ensemble ouvert est connexe si on ne peut pas le décomposer en deux ouverts disjoints (non vides, sinon c'est facile !).

Et pour les ensembles pas ouverts ?

\(\leadsto\) Dans ce cas, on va se focaliser sur la possibilité de séparer les différents morceaux, quelle que soit leur apparence, dans des ouverts disjoints non vides:

Définition 8.4.

On dit qu'un sous-ensemble \(A\subset \R^n\) est connexe si

\begin{equation*} A\subset A_1\sqcup A_2, A_1,A_2\text{ ouverts } \Rightarrow A_1=\emptyset \text{ ou } A_2=\emptyset \end{equation*}

Une autre possibilité, plus géométrique, consiste à observer que, si un ensemble est en un seul morceau, alors on peut relier ses points par un chemin continu:

Définition 8.5.

On dit qu'un sous-ensemble \(A\subset \R^n\) est connexe par arcs si, pour tous \(a,b\in A\text{,}\) il existe une courbe \(\gamma(t):[0,1] \rightarrow \R^n\) telle que

\begin{equation*} \gamma(0)=a,\gamma(1)=b,\text{ et pour tout } t\in [0,1],\ \gamma(t) \in A \end{equation*}

La connexité et la connexité par arcs, ce n'est pas tout à fait la même chose:

  • Tous les ensembles connexes par arcs sont connexes;

  • Par contre, il existe des ensembles connexes qui ne sont pas connexes par arcs. Par exemple, le graphe de la fonction \(\sin(\frac1x))\text{:}\)

    Figure 8.6. \(A=\{(x,\sin(1/x)),\ x\gt0\}\)

    Voir ici 3 .

www.bibmath.net/dico/index.php?action=affiche:&uoi=./a/accroissement.html
Question philosophique du jour: l'ensemble vide est-il un intervalle ?
www.bibmath.net/ressources/justeunexo.php?id=2233